mardi 2 décembre 2014

Meurtres pour rédemption - Karine Giébel




Quatrième de couverture :

Marianne, vingt ans. Les miradors comme unique perspective, les barreaux pour seul horizon. Perpétuité pour cette meurtrière. Une vie entière à écouter les grilles s'ouvrir puis se refermer. Indomptable, incapable de matriser la violence qui est en elle. Marianne refuse de se soumettre, de se laisser briser par l'univers carcéral sans pitié où elle affronte la haine, les coups. les humiliations. Aucun espoir de fuir cet enfer. 
Ou seulement dans ses rêves les plus fous. Elle qui s'évade parfois. grâce à la drogue, aux livres, au bruit des trains. Grâce à l'amitié et à la passion qui l'atteignent en plein coeur de l'enfermement. Pourtant, un jour. l'inimaginable se produit. Une porte s'ouvre. On lui propose une libération... conditionnelle. "La liberté Marianne. tu dois en rêver chaque jour, chaque minute, non ? - Oui". Mais le prix à payer est terrifiant. 
Pour elle qui n'aspire qu'à la rédemption...


Mon avis :

Livre coup de coeur. Livre coup de poing. Livre poignant.

Ca résume bien la chose.

Meurtres pour rédemption est un témoignage bouleversant de ce qu'il se fait de pire dans le milieu carcéral français. Témoignage bouleversant parce qu'il m'a foutu les tripes à l'envers tout au long de ces 988 pages. Et je ne suis pas du genre petite nature qui a la larmichette à l'œil quand des vilains-tout-pas-beaux font des trucs méchants dans les livres. Au contraire. Je suis plus du style à apprécier la chose avec un sourire sadique, tout en prenant des notes pour les futures tortures que je pourrais infliger à diverses personnes de ma connaissance.
Sauf que là. Je dois bien avouer que c'était difficile de faire passer mes fuites lacrymales pour une allergie à la connerie humaine.
Marianne. Comment expliquer Marianne. Je suis tombée amoureuse d'elle. De sa force. De ses faiblesses. De sa folie. De ses vices. Je suis tombée amoureuse de cette psychopathe qui ne s'assume pas, parce que justement, elle ne s'assume pas. Marianne est typiquement le genre de personnage qui dérange parce qu'on ne peut décemment se résoudre à l'aimer. Elle a fait des trucs moches. Et par trucs moches, j'entends tuer-des-gens-à-coups-de-kicks-dans-la-gueule. Mais elle ne l'a pas fait exprès. Et honnêtement, ça pardonne tout.
Ouais. Je suis une fille qui pardonne vite comme ça.
Je peux aussi vous filer mon 06 si vous avez besoin d'aide pour faire disparaître un corps.
Marianne qui m'a touché plus que je ne souhaiterais l'avouer. Avant, pendant et après ma lecture. Marianne qui ne me lâchait pas. Jamais. J'ai finis par vivre au travers d'elle, au travers de son histoire. Au travers de ses douleurs et de ses espoirs. Ca a été un peu un choc. Cela faisait une éternité qu'un personnage ne m'avait pas chamboulée de la sorte. Et quand j'ai commencé le bouquin, je ne m'attendais pas à ça. Pas comme ça du moins.
Parce que je suis tombée amoureuse de ce petit bout de femme. Femme qui mériterait une médaille malgré son CV de serial killeuse en herbe.

Pour parler de Meurtres pour rédemption, il faudrait que je vous la joue intello sur le retour. Le style un peu hippie qui milite contre le port des armes aux US alors qu'il habite à Albuquerque. Sauf que vous me connaissez maintenant, et en plus, je suis plus du style à me balader avec une kalachnikov dans mon string léopard.

Ce bouquin est une critique virulente et justifiée de l'univers carcéral français. De ses déboires. De ses limites. Mais surtout, une satire de la société d'aujourd'hui. Parce qu'au-delà de Marianne, c'est la vision qu'on en a qui nous revient en pleine face. Cette vision grotesque de la meurtrière jugée qu'on est bien content de savoir derrière les barreaux. Et c'est là que j'offre une standing ovation à Karine Giébel pour son tour de force.
Marianne est considérée comme la vermine à exterminer dès les premières pages du livre. On le ressent comme tel. On aime que ce soit le cas. Et quand elle se fait choper. On en mouillerait presque notre pantalon d'extase. Sauf que, les connards qui représentent l'administration judiciaire française finissent par nous déloger de notre petit nuage de condescendance et de bienséance gerbantes et on se fracasse le dentier sur le bitume. Proprement.
Sans pincettes. Sans lubrifiant.
Et c'est pas plus mal.
Karine Giébel nous parle du quotidien des détenus. De leurs souffrances. Du rejet qu'ils subissent. Constant. Violent. De cette déshumanisation régulière. Privés de nom. D'identité. De liberté. Mais aussi de pudeur. De solitude. De silence. Privés du droit d'être. Entre eux, face aux matons, face à la société et, la majeure partie du temps, privés d'être face à eux-mêmes. Elle parle de cette prostitution obligatoire en prison quand on a pas de mandats. Quand on a pas de famille qui assume derrière. Etre obligée de vendre son corps pour un paquet de clope, un fix, une brosse à dents ou parfois juste pour manger à sa faim. Elle parle de ce moment terrible où le prisonnier réalise que son avenir c'est ça : une heure de promenade par jour et des serrures qu'on ouvre ou qu'on ferme constamment. Mais parce qu'elle parle de ça, Karine Giébel réussit l'exploit de parler le mieux d'un sujet plus vaste, d'un sujet qui nous touche forcément : l'humanité.

Et j'ai adoré ce livre pour cette raison en particulier. Quand je fermais Meurtres pour rédemption, je ne pensais pas à Marianne comme la prisonnière qu'elle est. Mais comme une jeune femme qui vit des trucs terribles et qui tient le coup. Pas parce qu'elle n'a pas le choix. Mais parce que, malgré tout, elle s'accroche à sa dignité. Ou le peu qu'il en reste. Et même si ça paraît ridicule dis comme ça. Même si ça paraît futile. Au milieu de l'enfer dans lequel on l'a collée, Marianne et son lambeau de dignité font figure de héros légendaires. Je me suis même dis au cours de la lecture, qu'Hercule était une vraie gonzesse avec ses 12 travaux.
Bref.
Meurtres pour rédemption c'est gore, sanglant parfois, c'est de la torture psychologique et émotionnelle aussi. C'est dur, c'est violent, ça donne envie de tuer pas mal de gens à chaque coin de rue et c'est pour ça que ça vaut le coup.
Parce que je suis tombée amoureuse de Marianne alors que tout me poussait à la détester. Parce que ces 988 pages ne laissent aucun répit au lecteur tout comme elles ne laissent aucun répit aux personnages. Parce que les relations dans ce bouquin nous donnent matière à réfléchir sur nos propres relations dans la vie. Sur les gens. Leurs caractères. Sur la vision qu'on a d'eux et celle qu'ils ont d'eux-mêmes. Parce que tout au long du livre, je n'ai pas cessé de me dire que Karine Giébel nous rappelait là un truc essentiel.
Entre ce que les gens sont et ce qu'ils disent être, il y a comme une légère différence. Comme un gouffre. Un peu comme toi et moi et le prisonnier dans sa cellule qui purge perpét'.
Parce que malgré tous mes efforts, je n'ai pas réussi à détester les "bonnes" personnes. Parce que Meutres pour rédemption fout tous les clichés de la logique en l'air et qu'au final, les prisonniers deviennent beaucoup plus humains que les matons ne le seront jamais. Parce que les matons sont les archétypes même de ce qui devrait pourrir en prison. Justement. Et que malgré la puanteur du stéréotype du vilain-maton-méchant qui vous hérisse le poil d'ici (je le sens), il y a quelques exceptions qui nous mettent du baume au cœur. Qui nous empêche de vouloir tuer tous les gardiens de prison.
Parce que dans Meurtres pour rédemption, il n'y a pas de simples prisonniers et de simples matons. Il y a juste des gens foncièrement bons ou mauvais, peu importe le côté de la cellule qu'ils occupent.


Alors merci Karine Giébel. Merci pour cette claque dans la gueule qui durera bien au-delà de ces 988 pages. 


Ma note : 

20/20


12 commentaires:

  1. Aaaah, voilà une fan comme je les aime ! Mais attention, pas touche, Marianne c'est mon amoureuse à moi !
    Oui, je suis d'accord avec toi, ce livre mérite amplement son 20 sur 20. Il trotte numéro un dans ma tête depuis sa sortie : lu en 2006. Relu l'an dernier : même effets qu'à la première lecture...Indétrônable Marianne.

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    1. Mince ! T'es arrivé avant, je suis obligée de te laisser Marianne. Pas grave. J'veux bien devenir sa maîtresse.
      Je pense aussi que quand je le relirais ça me fera exactement le même effet. Ce livre est trop parfait pour ne pas l'apprécier à sa juste mesure.
      Amplement d'accord avec toi. Et ça résume très bien la chose : Indétrônable Marianne.

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  2. Oh God, I need it !
    (Ouais j'en perds mon français au profit de l'anglais !!)
    Bon je savais déjà que je le voulais. Mais je me retiendrai. (Comme pour Nosfera2 me diras-tu, et benh ouais.)

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    1. Mdr, comme les 3/4 des livres sur ce blog. Tu te retiendras.

      Ou pas.

      T'aimes trop trouver une excuse valable pour me détester.

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    2. Oh, tout ce que tu dis est vrai.
      Tu fais chier en fait.

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    3. (J'ai pas acheté Glitch par exemple !)

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  3. MERCI ALEX. Un de plus à rajouter à ma longue liste de 10km! En plus, j'aime bien Karine Giebel, elle écrit des trucs glauques (un peu trop des fois même)

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    1. Faut que je lise "Juste une ombre" maintenant. Il a l'air génial !

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  4. Hey popine, je te souhaite une bonne année via blog aussi (et ouais, je suis comme ça moi !!)
    Loooove

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    1. (Je ris de lire ce commentaire)

      PS : Allez, un petit article toooooople

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    2. Allleeeez, en voyant tes commentaires j'ai eu un léger espoir quant à un potentiel nouvel article mais... rien :'(

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  5. Fine way of explaining, and good paragraph to take information on the topic
    of my presentation subject matter, which i am going
    to present in institution of higher education.

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